Soutenance de thèse d'Aurélie Chassin de Kergommeaux

Les matières colorantes riches en oxy(hydroxy)des de fer sont fréquemment trouvées dans des contextes archéologiques, particulièrement du Paléolithique récent et ce en relation avec un vaste éventail de pratiques (peintures, activités). L’étude de ces matières, en combinaison avec d’autres matières minérales, permet d’examiner les relations entre différents lieux fréquentés par les groupes humains, notamment les gisements de matières premières, les sites d’habitats et les sites ornés. Le bassin versant de l’Yonne et le bassin parisien font partis de ces sites fréquentés comme en attestent d’une part, la richesse des affleurements de formations riches en oxy(hydroxy)des de fer et, d’autre part, les indices d’occupation humaine durant le Paléolithique. Déterminer l’origine géologique ou géographique de ces matières colorantes est complexe en raison des modifications de leur surface lors de leur exploitation et de la faible quantité préservée. De plus, certaines de ces matières peuvent être présentes naturellement dans les sédiments des sites paléolithiques. Il est donc crucial de distinguer les écofacts (matières naturelles) des vestiges archéologiques avant toute étude de provenance.

Une stratégie analytique mobilisant la pétrographie, s’appuyant sur un vocabulaire approprié et contrôlé, a été mise en place pour retracer les modi cations géochimiques et géophysiques des roches contenant des oxy(hydroxy)des de fer lors de leurs remobilisations naturelles. Cette approche permet de mieux comprendre l’origine et l’utilisation de ces matières au Paléolithique ainsi que les altérations qu’elles ont subies. En abordant les stratégies d’acquisition tout en prenant en compte les trajectoires spatiales et compositionnelles des matières riches en oxy(hydroxy)des de fer et en s’appuyant sur la comparaison entre les matières géologiques échantillonnées et les vestiges archéologiques, il est possible de mieux identifier les distances entre les sources de matières premières et les sites d’occupation. Cette méthode a montré son efficacité dans le bassin versant de l’Yonne en s’appuyant sur la connaissance des ressources géologiques existantes.

Chaque site archéologique étudié dans cette recherche doctorale présente un assemblage différent de matières premières, re étant des pratiques et des environnements variés aux trois périodes d’occupation étudiées (Magdalénien à Pincevent, Badegoulien au Mont Saint-Aubin et Châtelperronien à la grotte du Renne), ainsi que des continuités dans l’exploitation de certaines formations géologiques régionales et extra-régionales qui restent connues par des groupes humains de chrono-cultures différentes, témoignant de transports de ressources dans différentes directions, vers le sud-est et le nord-ouest. Même si des matières ont aussi été récoltées dans les alluvions par les groupes humains de ces différentes périodes, les zones d’approvisionnement extra-régionales témoignent de réseaux de lieux étendus sur plus de 200 km.